Fait N° 53
Diana Apcar fut l’une des premières femmes diplomates au monde
Nous sommes dans un monde d’hommes, dit-on. En fait, les choses ont changé dans de nombreuses régions du monde, ces dernières décennies. Il est certain que plusieurs mondes en tant que tels – le monde des sports, le monde des affaires, le monde de la science – ont commencé à se répartir équitablement, en terme de représentation par genre.
S’il est un monde qui inclut le monde en tant que tel, c’est bien celui de la diplomatie. De fait, la politique et les affaires internationales n’ont compté que de rares patronymes féminins, avant les années 1950. L’Arménie fut en quelque sorte pionnière, peut-on dire, car l’éphémère république d’Arménie de 1918 fut, en fait, représentée au Japon par une femme.
Diana Apcar appartenait à une lignée indo-arméno-persane, remontant à ces marchands arméniens écumant les routes d’est en ouest, depuis le 17ème siècle. Originaire de la famille Agabeg, née à Rangoun, en Birmanie (Yangon, Myanmar) en 1859, elle fut élevée à Calcutta et épousa un membre de la famille Apcar, elle aussi d’origine indo-arméno-persane, en 1889 à Hong Kong. La société Apcar and Co. avait été créée à Bombay en 1819 et s’était développée au point d’intégrer toutes sortes d’intérêts dans le commerce, la manufacture et l’agriculture en Inde, en Asie du Sud-Est, jusqu’au Japon, où Diana et son mari Apcar Michael Apcar s’établirent en 1891. Devenue veuve en 1906, Diana Apcar dut assumer la responsabilité de veiller sur son ménage, tout en gérant l’entreprise familiale jusqu’à ce que ses trois enfants survivants fussent majeurs.
Il n’est pas exagéré de dire que Diana Apcar avait la tête sur les épaules. Elle se fit connaître tout d’abord par ses écrits. Mis à part des œuvres en prose et de poésie, elle suivit l’évolution des Arméniens dans l’empire ottoman, commentant fréquemment leur situation terrible, tentant de susciter une prise de conscience en particulier chez les Occidentaux présents en Extrême-Orient. Travailleuse infatigable, et fidèle pratiquante, Diana Apcar joua un rôle clé pour lever des fonds et porter secours aux victimes du génocide arménien.
Son rôle éminent l’ayant fait connaître à travers le monde, Diana Apcar fut nommée consul de la république d’Arménie au Japon – un poste diplomatique qui n’avait peut-être jamais été occupée par une femme à l’époque moderne. Cette fonction lui permettait de s’exprimer au nom d’un Etat souverain, lorsqu’elle s’adressait à des personnalités et à des institutions influentes, comme lorsqu’elle écrivit au Président des Etats-Unis, Woodrow Wilson, entre autres responsables de haut rang. Son statut diplomatique lui permit aussi d’accepter des réfugiés arméniens qui tentaient de se rendre au Japon (souvent via la Russie), où il était question de documents et de paperasse. De nombreuses familles refirent leur vie sur la Côte Ouest des Etats-Unis et ailleurs, grâce à l’intervention de Diana Apcar.
La république d’Arménie de 1918 dura à peine deux ans et demi – même si l’un des pays à la reconnaître et à établir avec elle des relations officielles s’avéra être le Japon, ce qui n’était pas une mince affaire alors, et ce grâce aux efforts de Diana Apcar. Outre le fait de délivrer des passeports, ce n’est pas un hasard si Apcar est connue comme « la Petite mère d’une nation » (même si sa petite taille peut être une des raisons). Sa sollicitude pour ses compatriotes, originaires d’un pays où elle ne mit jamais les pieds, n’eut d’égal que son empressement à écrire des articles, des pamphlets et des ouvrages, plaidant pour une justice et une aide aux opprimés. Par delà le génocide arménien, Apcar écrivit sur la paix dans le monde en général et le fléau que constituent l’impérialisme et l’exploitation des peuples plus faibles par des puissances plus fortes.
Les funérailles de Diana Apcar en 1937 furent suivies par une nombreuse assistance, en témoignage de ses efforts durant sa vie, qui honoraient sa mort. Ses descendants résident à la fois en Asie et en Amérique du Nord.
Traduction : © Georges Festa
Références et autres ressources
1. Diana Apcar
“Articles about Diana”
2. Armenian Cultural Foundation. “Diana A. Apcar (1869-1937): The First Armenian Woman Diplomat”
3. Sarah Soghomonian. “Lucille Apcar Introduces New Book”, Hye Sharzhoom, Vol. 26, No. 2 (88), December 2004
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Titre de l'image
Le cimetière étranger de Yokohama, Japon, où repose Diana Apcar.
Source et attribution
Par Chris 73 (Travail personnel) [CC-BY-SA-3.0], via Wikimedia Commons
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