Fait N° 52
Le catholicos de la Grande Maison de Cilicie siège à Antélias, au Liban.
A mesure que la capitale de l’Arménie changeait de lieu – tandis que les différents conquérants progressaient en Arménie et que les différents royaumes arméniens surgissaient et disparaissaient – l’ultime tentative d’indépendance arménienne avant l’époque moderne se fit entendre sur la côte sud-est de l’actuelle Turquie, une région appelée historiquement la Cilicie (Çukurova en turc moderne), où un royaume arménien dura de 1198 à 1375.
Suite à l’afflux des populations arméniennes, qui résulta des invasions des Turcs seldjoukides, le catholicos – chef de l’Eglise arménienne – se retrouva en Cilicie en 1116 après J.-C., ayant depuis longtemps quitté le site originel d’Etchmiadzine institué par l’évangélisateur des Arméniens, saint Grégoire l’Illuminateur, au début du 4ème siècle. En 1292, la capitale Sis (l’actuelle Kozan) accueillit le catholicos arménien. Lorsque la Cilicie arménienne tomba en 1375, le projet de ramener le catholicossat à Etchmiadzine en 1441 fut âprement discuté. Résultat, plus d’un patriarche arménien possède depuis lors le titre de « catholicos » – bien que cet honneur suprême soit réservé au catholicos de tous les Arméniens d’Etchmiadzine.
Sur plus d’un millier de prêtres arméniens, victimes du génocide arménien, figuraient ceux qui étaient au service du catholicos de Sis. Lequel gagna le sud en 1921 avec la vague de déportés arméniens, errant à travers la Syrie et le Liban. Finalement, en 1930, le catholicos de Sis acquit un terrain qui hébergea un orphelinat via une organisation américaine, le Near East Relief, situé à Antélias, près de Beyrouth au Liban.
Antélias compte aujourd’hui une cathédrale, un musée et une bibliothèque, outre le fait de servir de résidence au catholicos de la Grande Maison de Cilicie – pour reprendre son titre officiel – et de préparer le clergé à servir les différentes paroisses arméniennes sous sa juridiction. Le Saint-Siège de Cilicie a en charge ses fidèles arméniens au Liban, en Syrie (Alep), à Chypre, en Grèce, en Iran et dans les pays du Golfe.
Des controverses ont surgi au milieu du 20ème siècle, concernant le catholicos d’Etchmiadzine en Arménie et celui d’Antélias au Liban, notamment au regard de la Guerre froide, l’Arménie étant passé sous domination soviétique communiste. Résultat, certaines paroisses se retrouvèrent divisées entre eux – la division la plus complète se manifestant aux Etats-Unis et au Canada, où des églises relevant à la fois du catholicos de tous les Arméniens et du catholicos de la Grande Maison de Cilicie continuent de fonctionner (alors même que ces paroisses utilisent le même terme en arménien pour se définir – « tem » – les premières se nomment « diocèses, » dirigés par un « primat » en anglais, tandis que les secondes préfèrent être présentées comme des « prélatures » dirigées par un « prélat »).
Champ de bataille politique et idéologique par le passé, cette division n’a plus autant d’impact sur la génération actuelle, en particulier depuis l’indépendance de l’Arménie en 1991. Fait notable, le catholicos arménien d’Antélias fut élu comme nouveau catholicos arménien d’Etchmiadzine en 1995. Même si les deux titres demeurent, et que les juridictions et divisions administratives perdurent, les relations entre Antélias et Etchmiadzine ne sont aucunement dégradées, au plan public. En fait, un synode (rencontre, rassemblement) général de tous les évêques arméniens s’est tenu à Etchmiadzine en 2013 – annoncé comme le premier depuis quatre siècles – pour au moins s’accorder, par exemple, sur la canonisation de nouveaux saints, en particulier les victimes du génocide arménien, à temps pour les commémorations du centenaire organisées en 2015. En général, les coutumes et les usages des églises arméniennes relevant des deux catholicos ne diffèrent pas sensiblement.
Traduction : © Georges Festa
Références et autres ressources
1. Hratch Tchilingirian. “The Catholicos and the Hierarchical Sees of the Armenian Church”, Eastern Christianity: Studies in Modern History, Religion and Politics (edited by Anthony O’Mahony). Melisende, 2004, pp. 140-159.
2. Michael Papazian. “Armenian Apostolic Church (See of the Great House of Cilicia)”, Religions of the World, Second Edition: A Comprehensive Encyclopedia of Beliefs and Practices (edited by J. Gordon Melton and Martin Baumann). ABC-CLIO, 2010, pp. 188-189
3. Armenian Church, Catholicosate of Cilicia, Antelias – Lebanon
4. David M. Herszenhorn. “Armenian Church, Survivor of the Ages, Faces Modern Hurdles”, International New York Times, October 3, 2013l
5. Wikipedia: “Holy See of Cilicia”
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La rencontre du Catholicos Khoren I avec l’Archêveque Makarios III, une figure politique et sociale influente au Chypre; le Catholicossat de la Grande Maison de Cilicie est très actif dans tout ce qui concerne le dialogue inter-religieux et interdénominationnel, domaines auxquels il avait plus d’accès que le Catholicossat d’Etchmiadzin sous la domination soviètique pendant la plus grande partie du 20ème siècle.
Source et attribution
Par Alexander-Michael Hadjilyra (Travail personnel) [CC-BY-SA-3.0], via Wikimedia Commons
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