Fait N° 86
Un système de notation pour la musique classique turque (et arménienne) fut développé par Hampartsoum Limondjian en 1813.
Selon certains, les mathématiques sont le seul langage véritablement universel. D’autres préfèreraient attribuer ce titre à la musique. Et d’autres encore – souvent ceux qui ont étudié les deux ou l’une d’elles – seraient heureux d’admettre que les deux se partagent l’intérêt du plus grand nombre. Et, à l’instar des langues naturelles que nous parlons, la musique et les mathématiques ont leurs systèmes d’écriture, qui doit avoir le même type de cohérence et d’ordonnancement. Il n’est pas exagéré au fond, d’affirmer que la notation musicale est jalonnée de chiffres – même si le fait d’entendre la mélodie d’une équation binomiale n’est peut-être pas si aisé.
Né à Constantinople en 1768, Hampartsoum Limondjian n’avait guère fait d’études mathématiques, c’est vrai, mais il était familiarisé à la musique, en tant que fidèle de l’Eglise arménienne. Au lieu de se contenter de savoir compter et garder le rythme, Limondjian entreprit de développer un système de notation musicale, après avoir étudié sous divers maîtres dans les nombreux cercles ottomans auxquels il participait : les Arméniens et leur liturgie, la confrérie soufie des Mevlévis avec ses derviches tourneurs, jusqu’à la cour du sultan Sélim III.
L’ancienne tradition arménienne de notation musicale, appelée « khaz, » servait de base pour accompagner ce que l’on appelait les neumes – des systèmes de signes utilisés avant le déploiement des notations musicales occidentales courantes aujourd’hui. L’Hamparsum notasi, comme elle est appelée en turc, devint largement utilisée pour écrire la musique turque et arménienne, après sa mise au point en 1813. Les Arméniens sont peut-être le seul peuple au monde, en fait, à avoir édité de la musique, à l’aide de trois systèmes différents de notation – l’ancien khaz, le système de Limondjian et les partitions musicales occidentales modernes à cinq lignes.
Limondjian, surnommé « Baba Hamparsoum, » fut aussi célèbre à son époque comme compositeur et interprète. Ses contributions à la musique religieuse arménienne furent complétées par ses chants turcs dans le style classique célébré à la cour ottomane. Il mourut à Constantinople en 1839.
Autre patronyme arménien connu à travers le monde, Edgar Manas (1875-1964), qui descendait d’une ancienne famille d’artistes, longtemps au service de la cour ottomane. Manas fit l’essentiel de ses études en Italie, mais exerça ses activités musicales, de retour dans sa Constantinople natale, rebaptisée ensuite Istanbul. Très doué, il composa de nombreuses œuvres dans des genres divers, au cours de sa longue carrière. Manas travailla avec des Arméniens, enseignant et dirigeant chœurs et groupes, tout en collaborant étroitement avec l’Eglise arménienne et sa tradition musicale. Il composa aussi de la musique classique, inspiré par plusieurs écoles et styles occidentaux.
Edgar Manas est surtout commémoré dans la Turquie actuelle comme l’un des compositeurs, rien de moins, de l’hymne national turc. Même s’il n’est pas à l’origine de sa rédaction, l’orchestration de l’İstiklal Marşı fut arrangée par lui.
Traduction : © Georges Festa
Références et autres ressources
1. Hamparsum
2. Rouben Paul Adalian. Historical Dictionary of Armenia. Scarecrow Press, 2010, pp. 453-454
3. Naregatsi Art Institute. “Mher Navoyan | Komitas’ Legacy against the Background of Identity Problematique”, 1 hour 4 minutes 27 seconds (in Armenian)
4. Wikipedia: “Hampartsoum Limondjian”
5. Wikipedia: “Edgar Manas”
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Titre de l'image
Les chants d’église arméniens dans le système de notation musicale de Hampartsum Limondjian, écrit à la main au début du 20ème siècle
Source et attribution
By Chaojoker (Own work) [CC-BY-SA-3.0 or GFDL], via Wikimedia Commons
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