Fait N° 74
Au Moyen Age, les Arméniens de Pologne possédaient leurs propres tribunaux.
La diaspora arménienne existait bien avant le génocide arménien. Des Arméniens tentèrent leur chance aux quatre coins des empires dont ils étaient sujets dans les temps anciens, au service de leurs suzerains romains ou parthes, ou plus tard comme pèlerins et marchands partis s’établir à Jérusalem, par exemple. Une grande vague d’émigration arménienne frappa l’Arménie historique après la chute de la capitale, Ani, en 1045 après J.-C., lors de laquelle un grand nombre d’entre eux se retrouvèrent en Europe centrale et méridionale au sein de communautés organisées, durables, dont beaucoup existent encore aujourd’hui.
Dans toute cette région, l’histoire est la même : durant des siècles, les Arméniens formèrent les principaux négociants et marchands, tout en pratiquant des arts et des artisanats essentiels à l’économie. Ils furent souvent des novateurs, impulsant très tôt idées nouvelles et technologies, tout en semant les germes de la bourgeoisie urbaine de la Pologne, de l’Ukraine, de la Hongrie, de la Roumanie et de la Hongrie actuelles. Ils furent souvent reconnus pour leur mérite, bénéficiant de grandes libertés et de privilèges particuliers – exemptions fiscales, par exemple, ou autonomie afin d’administrer eux-mêmes leurs communautés – comme celle accordée au 14ème siècle par le roi Casimir III de Pologne. Les Arméniens géraient même leurs affaires juridiques au moyen de tribunaux fondés sur le Statut des Arméniens approuvé par le roi Sigismond Ier l’Ancien de Pologne en 1519, et qui perdura jusqu’en 1780.
Non seulement plusieurs rues et quartiers portent le nom « Arménien » en Europe centrale et méridionale, mais quelques localités et villes portent ce nom, comme l’ancienne Armenopolis ou Armenierstadt (« Hayakaghak » en arménien) de Transylvanie en Roumanie, appelée maintenant Gherla – célèbre pour son style architectural « baroque arménien » – ou Armyansk en Crimée. En fait, il y avait tant d’Arméniens dans la péninsule de Crimée aux 13ème et 14ème siècles que certains la qualifiaient alors d’« Armenia Maritima » ou d’« Armenia Magna ».
L’on serait étonné d’apprendre le nombre d’églises arméniennes dans cette région, plusieurs fois séculaires. La cathédrale arménienne de Lviv (Lvov), au nord de l’Ukraine actuelle, pour ne citer qu’un exemple, est un point de repère important de cette ville, se composant à l’origine d’un édifice en bois bâti en 1183, remplacé par une structure actuelle réalisée à la fin du 14ème siècle, quasiment à la même époque où le monastère arménien de Sainte-Croix (« Sourp Khatch ») fut construit, près de Staryi Krym en Crimée. L’Eglise Arménienne œuvra finalement en faveur d’une union avec le Vatican concernant les Arméniens de cette région, en commençant par la Pologne au milieu du 17ème siècle – un événement sans précédent dans l’histoire de l’Eglise Catholique Romaine. Pendant ce temps, la ville de Botoşani au nord-est de la Roumanie s’enorgueillissait de la plus ancienne église arménienne existant en Europe, édifiée vers 1350.
De nombreuses personnalités, qui ont contribué à ces pays, étaient d’origine arménienne, dont des membres de l’aristocratie. Certains dirigeants de la Bulgarie, au Moyen Age, par exemple, étaient issus de familles arméniennes. La Hongrie, en particulier, commémore ceux qui combattirent et moururent pour le pays lors de la Révolution de 1848 (János Czetz, qui survécut, devint l’un des fondateurs de l’Académie nationale militaire d’Argentine). Ivan Aivazovsky (Hovhannes Aivazian), artiste réputé au 19ème siècle pour ses marines, était de même natif de Feodosia en Crimée. De nos jours, Varujan Vosganian reste une figure éminente de la politique roumaine, tout en étant très connu comme écrivain.
L’on pourrait écrire bien des pages sur l’histoire et la culture des Arméniens de cette région, bien au-delà de ces quelques villes et pays mentionnés.
Même si une grande partie de l’expression culturelle et bien sûr religieuse fut restreinte dans ces régions à l’époque communiste au 20ème siècle, les communautés arméniennes continuent d’enrichir la diaspora et les lieux qu’elle fait siens grâce à sa présence en Europe centrale et orientale aujourd’hui.
Traduction : © Georges Festa
Références et autres ressources
1. Mihai Stepan Cazazian. “A Brief Overview Of The Armenian Community In Romania”, The Continent of Romania, 27:1, 2006
2. “Destination: Romania / Europe’s oldest Armenian church building is located in Botosani”, Agerpress, April 24, 2014
3. Bohdan Struminsky. “Armenians”, Internet Encyclopedia of Ukraine
4. human rights. “Ethnic Armenians in Hungary”
5. nezzeslassponteu. “Örmény Kultúra Szamosújváron 2006”, 18 minutes 41 seconds (in Hungarian, sub-titles in English)
6. rub3nski. “Poland you don’t know – Armenian character”, 4 minutes (in Polish, sub-titles in English)
7. UNESCO. “Old City of Zamość”
8. Wikipedia: “Armenians in Poland”
9. Wikipedia: “Armenians in Hungary”
10. Wikipedia: “Armenians in Ukraine”
11. Wikipedia: “Armenians in Crimea”
12. Wikipedia: “Armenians of Romania”
13. Wikipedia: “Armenians in Bulgaria”
14. Wikipedia: “Varujan Vosganian”
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Titre de l'image
Demeures de marchands arméniens datant du 17ème siècle, bordant la place du marché à Zamość, au sud-est de la Pologne ; la vieille ville de Zamość est inscrite sur la Liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO.
Source et attribution
By MaKa (Own work) [GFDL 1.2 or CC-BY-SA-2.5-2.0-1.0], via Wikimedia Commons
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