Fait N° 84

La bataille d’Avaraïr eut lieu le 26 mai 451 après J.-C.

En 428 après J.-C., le royaume de Grande Arménie n’avait plus de souverain indépendant et était, au contraire, soumis à la dynastie Sassanide (Sassanian) de la Perse (Parthie) voisine. Les familles nobles arméniennes continuaient cependant de contrôler leurs terres et de jouer un rôle important, parmi lesquelles les Mamikonian (Mamigonian), qui détenaient de longue date le titre de « sparapet » (« sbarabed »), ou connétable.

Vartan Mamikonian est peut-être le membre le plus célébré de cette dynastie. Une part de son héritage remonte à la lignée de saint Grégoire l’Illuminateur, fondateur du christianisme arménien. Vartan fut éduqué et était même censé rejoindre le clergé, avant de reprendre la charge familiale de diriger les troupes – une fonction qui se révèlera des plus utile sous le règne de Yazdgard II. Depuis Ctésiphon, la capitale sassanide, l’ordre fut lancé en 449 d’abandonner le christianisme et d’adopter le zoroastrisme, la religion païenne perse. Cette mesure était d’ordre politique, l’appartenance religieuse pouvant avoir des implications majeures sur les relations entre les empires sassanide et byzantin à cette époque, puisque le christianisme était déjà établi dans le monde byzantin.

Alors que certains membres de la noblesse arménienne se rangèrent aux côtés de leur suzerains perses, la rébellion dirigée par Vartan Mamikonian et ses alliés – le Vartanank, comme on les appelle en arménien – mena la résistance et prit les armes. La bataille culminante eut lieu, selon la tradition, le 26 mai 451 après J.-C. dans la plaine d’Avaraïr (située aujourd’hui là où l’Iran et la Turquie bordent l’exclave azerbaïdjanaise du Nakhitchevan). Largement inférieurs en nombre, avec quelque 60 000 guerriers faisant face à l’assaut d’environ 200 000 autres, le Vartanank succomba finalement aux combattants perses montés sur des éléphants. Les efforts des rebelles ont été immortalisés par les chroniqueurs arméniens, qui attribuent à Vartan ces paroles inspirantes : « Une mort imprévue revient simplement à mourir, mais une mort librement consentie rend immortel. »

Les 1036 guerriers du Vartanank sont considérés comme des martyrs par l’Eglise arménienne. Ils sont célébrés comme des saints, chaque année, le jeudi qui précède le Carême. Même s’ils ont perdu cette bataille dans leur combat au nom du christianisme, l’histoire de Vartan Mamikonian et de ceux qui ont combattu à ses côtés est souvent évoquée dans les milieux arméniens comme une victoire morale, au final. Or, même au plan pratique, un grand coup avait été porté contre la partie sassanide, au point que Yazdgard II abandonna son projet d’imposer le paganisme aux Arméniens.

La même politique fut poursuivie à nouveau, quelques décennies plus tard, et une révolte conduite cette fois par le neveu de Vartan, Vahan Mamikonian, se traduisit par une victoire en bonne et due forme, les Arméniens se voyant reconnaître la liberté de culte et de régler leurs affaires intérieures. Cet accord, connu sous le nom de traité de Nvarsak, est considéré comme « le premier traité dans l’histoire, obligeant un tyran à reconnaître le principe de la liberté religieuse. »

Traduction : © Georges Festa

Références et autres ressources

1. The Eastern Diocese of the Armenian Church of America. “St. Vartan and the Battle of Avarayr”
2. R. Hewsen. “Avarayr”, Encyclopædia Iranica, Vol. III, Fasc. 1, 1987
3. Hacikyan, Basmajian, Franchuk, Ouzounian. The Heritage of Armenian Literature, Vol. 1: From the Oral Tradition to the Golden Age. Wayne State University Press, 1999
4. Wikipedia: “Battle of Avarayr”