Fait N° 83

Le massacre des Arméniens de Soumgaït, en Azerbaïdjan soviétique, débuta le 27 février 1988.

Le mouvement pour les droits et la sécurité des Arméniens vivant en Azerbaïdjan soviétique – en particulier dans la région autonome du Nagorno-Karabagh – était une initiative pacifique, censée être réglée dans le cadre de l’URSS, conformément aux dispositions du droit soviétique. Le climat plus tolérant, que les années Gorbatchev avaient suscité au milieu des années 1980, fit espérer aux Arméniens que glasnost et perestroïka les aideraient à amener un règlement favorable, durable, d’une question qui était en attente dans la Transcaucasie soviétique depuis les années 1920.

Tout espoir d’éviter la violence fut brisé fin février 1988. Parmi de grandes tensions et suite à des rapports sur une échauffourée interethnique au Nagorno-Karabagh, des émeutiers azerbaïdjanais bien organisés ciblèrent des particuliers et des familles arméniennes dans la ville industrielle de Soumgaït, dans les environs de la capitale azerbaïdjanaise, Bakou. Des armes de fortune telles que des tuyaux ou du métal aiguisé furent utilisées pour traquer les Arméniens chez eux, blesser, tuer, violer et piller, lors d’un pogrom qui dura du 27 au 28 février. Le nombre des victimes n’a jamais été établi avec certitude, allant de quelques vingtaines ou trentaines jusqu’à plusieurs centaines, sans oublier les blessés ou les mutilés, ainsi que les milliers d’autres qui prirent ensuite la fuite. Parallèlement, il convient de souligner que de nombreux Arméniens auraient été cachés ou protégés par des Azerbaïdjanais ou des voisins appartenant à d’autres nationalités lors de ces événements.

La réaction du gouvernement au massacre de Soumgaït fut lente et hésitante. Le pouvoir local azerbaïdjanais resta totalement inactif. Il utilisa la loi martiale imposée par Moscou pour prendre finalement le contrôle de la situation. La couverture médiatique officielle limitée qui en résulta et des procès empreints de négligences n’incitèrent pas à prendre des mesures énergiques. En particulier, le caractère prémédité, organisé de ce pogrom n’a jamais été pleinement reconnu, ni étudié. Une des conséquences de cette impunité fut que d’autres massacres d’Arméniens eurent lieu à Kirovabad (Gandja) en novembre 1988 et à Bakou en janvier 1990, entre autres lieux de l’Azerbaïdjan soviétique.

Tant au sein de l’URSS qu’au plan international, cet épisode fut un motif d’embarras, en contradiction avec certains éléments populaires de l’idéologie soviétique, comme l’amitié entre les peuples. En fait, l’ensemble du conflit du Nagorno-Karabagh contribua de façon décisive à révéler l’impéritie du modèle soviétique et l’effritement final de l’URSS. (Consulter notre article sur la république du Nagorno-Karabagh pour en savoir plus sur ce litige en cours.)

Soumgaït reste à ce jour une ville industrielle en Azerbaïdjan, vidée de sa population arménienne d’autrefois, comme la plupart des autres régions du pays. Même si le territoire du Nagorno-Karabagh (Artsakh) est au centre de ce soi-disant « conflit gelé, » des Arméniens ont perdu la vie ou ont été déracinés à travers tout le territoire de ce qui fut l’Azerbaïdjan soviétique. De nombreux réfugiés se sont retrouvés en Russie et aux Etats-Unis, où des communautés originaires de Bakou résident maintenant, de Moscou au Michigan.

Traduction : © Georges Festa


Références et autres ressources

1. “Nationalism at Its Nastiest”, The New York Times, January 19, 1990
2. “An Open Letter on Anti-Armenian Pogroms in the Soviet Union”, The New York Review of Books, September 27, 1990
3. Anna Astvatsaturian Turcotte. Nowhere, a story of exile. hybooksonline.com, 2012
4. Zohrab Information Center. “Nowhere: A Story of Exile”, 27 minutes, 6 seconds
5. Anna Astvatsaturian Turcotte, “A Baku Pogrom Eyewitness Recounts the Ordeal 25 Years Later”, Asbarez, January 13, 2015
6. Against Xenophobia and Violence NGO. The Sumgait Syndrome. Anatomy of Racism in Azerbaijan. MIA Publishers, 2012
7. Inna Mirzoyan, “Revealing the Truth Behind the Baku-Sumgait Pogroms – One Family at a Time”, Asbarez, January 13, 2015x
8. Julia Papiyan. “Baku Pogroms 25 Years Later: I am Regina Papiyan”, Asbarez, January 16, 2015
9. Office of the Nagorno Karabakh Republic in the United States. “Ethnic Cleansing Campaigns
10. Wikipedia: “Sumgait pogrom
11. Wikipedia: “Karabakh movement


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Source et attribution

By Vaghinak Petrosyan [CC-BY-2.0], via Wikimedia Commons


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