Fait N° 82

L’épopée arménienne des Casse-cous du Sassoun fut publiée pour la première fois en 1873.

De nos jours, quand on pense au mot « épopée », c’est souvent dans le cadre de productions à gros budget, y compris des classiques anciens et modernes, allant d’Autant en emporte le vent à La Guerre des étoiles – débordantes d’actions, d’explosions, souvent très dramatiques. Mais cette formule est plutôt ancienne. On trouve des exemples de poésie épique dans de nombreuses cultures, comme les Grecs avec l’Iliade, sur la guerre de Troie, ou les Indiens et le Mahabharata, autre récit articulé autour d’une formidable bataille. Ces deux œuvres remontent à plus de deux mille ans. Plus tard, au Moyen Age, figurent des œuvres telles que la Chanson de Roland ou le Beowulf, pour ne citer que deux exemples en Europe Occidentale.

Les Arméniens possèdent leur propre épopée, à savoir Les Casse-cous du Sassoun, intitulée aussi David de Sassoun (Sasountsi Davit ou « Tavit » en arménien), entre autres titres. Il s’agit d’un long poème en quatre cycles (parties), qui suivent quatre générations d’une famille, David étant la troisième, précédé de Sanasar et Baghdasar, puis du Grand Mher (« Mets » ou « Medz Mher, » appelé aussi « le Grand Lion »), pour finir avec le Petit Mher (« Pokr Mher »). Conformément aux épopées à travers le monde, le récit compte des exploits fantastiques et des aventures incroyables, dans le contexte premier du bien contre le mal et du combat pour la justice.

Bien que l’épopée en tant que telle remonte aux 8ème-10ème siècles – détaillant clairement, en particulier, la lutte contre la domination arabe à cette époque – nombre d’éléments des cycles du Sassoun incluent des aspects beaucoup plus anciens, y compris des vestiges de la culture arménienne païenne. Les mémoires populaires des rivalités et des combats entre les dirigeants arméniens et mésopotamiens, un millier d’années avant le Christ, furent peut-être transformées à l’époque médiévale, ciblant à l’opposé le calife de Bagdad ou le roi d’Egypte.

Il peut sembler étonnant de noter que Les Casse-cous du Sassoun ne représentent pas une expression emblématique de la culture arménienne en littérature – à coup sûr, lorsqu’on aborde des œuvres de l’Eglise arménienne, contrairement à d’autres sources écrites en arménien. Si des témoignages existent de la part de Portugais traversant la région au 16ème siècle, il faut attendre 1873 pour qu’un évêque arménien entreprenne de la coucher par écrit. Ce ne fut pas une tâche aisée, les décennies qui suivirent révélant plus de cent cinquante variantes de cette épopée, transmises oralement pendant des générations, depuis mille ans au moins. Une récitation de l’œuvre intégrale demanderait des jours. Ce genre de spectacle a survécu en fait et a été inclus en 2012 dans la liste du Patrimoine Culturel Immatériel de l’Humanité de l’UNESCO. Depuis plus d’un siècle, différentes traductions ont été faites en plusieurs langues et sous des formes diverses. Il existe maintenant des recueils scientifiques des nombreuses versions de cette épopée, ainsi que des adaptations poétiques, partielles ou intégrales.

David de Sassoun est aujourd’hui un élément essentiel de la culture populaire de l’Arménie, sans être aussi important dans la diaspora. La statue de David à cheval, près de la gare d’Erevan, réalisée par Yervand Kochar en 1959, est une sculpture saisissante, utilisée parfois comme symbole de la ville. Lui faisant écho, Fresno, en Californie, a de même décidé de présenter David sur sa montagne, se dressant pour combattre, lorsque la sculpture de Varaz Samuelian fut installée dans cette ville en 1971.

Traduction : © Georges Festa


Références et autres ressources

1. Der Mugerdechian, Kouymjian. David of Sassoun: Critial Studies on the Armenian Epic. The Press at California State University Fresno, 2013
2. UNESCO. “Performance of the Armenian epic of ‘Daredevils of Sassoun’ or ‘David of Sassoun’”
3. UNESCO. “Performance of the Armenian epic of ‘Daredevils of Sassoun’ or ‘David of Sassoun’”, 9 min. 50 s.
4. Aris Janigian. “Retelling David of Sassoun: An Interview with David Kherdian”, The Armenian Weekly, February 12, 2014
5. “David of Sassoun: Critical Studies on the Armenian Epic”, Civilnet, October 17, 2013
6. Downtown Fresno Partnership. “David of Sassoon
7. Wikipedia: “Daredevils of Sassoun
8. Wikipedia: “David of Sassoun


Suivez-nous sur

100y100f_082_DavidSassoun

Titre de l'image

Une aquarelle de Hakob Kojoyan de 1922 représentant de nombreuses scènes de Casse-cous de Sassoun


Source et attribution

By Hakob Kojoyan [Public domain], via Wikimedia Commons


Faits récents

… et que le peuple arménien continue de se souvenir et de demander justice.

Fait N° 100

... et que le peuple arménien continue de se souvenir et de...

… tandis que les minorités en Turquie sont souvent limitées dans leur expression par la politique de l’Etat…

Fait N° 99

... tandis que les minorités en Turquie sont souvent...

Des Arméniens continuent de vivre en Turquie…

Fait N° 98

Des Arméniens continuent de vivre en Turquie…

Le plus long téléphérique au monde a ouvert en Arménie en 2010.

Fait N° 97

Le plus long téléphérique au monde a ouvert en...